Catherine Perrier

Création unique “é/moi (s)” 2 – Catherine Perrier

700,00

1 en stock

Création unique 33 x 42 cm

Techniques mixte

2016

L’immensité intime

« En ayant un demi-centimètre de quelque chose, vous avez plus de chance de tenir un certain sentiment de l’univers que si vous avez la prétention de faire le ciel entier. » Alberto Giacometti

Ma démarche se présente sous formes sérielles de petits formats ( chaque série est un roman, chaque tableau est une page ) et présente aussi parfois des images presque miniatures amenant le spectateur à rentrer dans l’œuvre, tout comme Alice traversant le miroir. C’est en creusant dans l’intime qu’il élargit son champ de liberté.
Pour ouvrir cette sphère, c’est le réel que j’interroge.
Et mon réel est matérialisé par les images qui nous entourent. Je me suis donc faite glaneuse, guetteuse, voleuse, joueuse… d’images.
Images rêvées, prises, volées, ramassées, cueillies, agencées comme le fait un écrivain avec les mots. Je deviens alors écrivain d’images.
Des images qui glissent, se tissent, se choquent, s’entrechoquent juste assez pour que la question et l’émotion se posent.
Pour que ce que l’on croit perdu se reconstruise dans un mouvement perpétuel par nos pensées et nos regards croisés dans des mises en scène où l’ombre et la lumière sont à la fois des révélateurs et des perturbateurs de sens.
L’ombre agit comme évidence et questionnement du double.
En utilisant des images déjà existantes, je redonne vie autrement. Je mets le « faire » à distance et affirme le « non-faire » pour mieux approcher une autre vérité, celle de l’autre vie, la « contre-vie ». J’essaie de perdre pour trouver.
On pourrait parler d’art conceptuel poétique.
Une posture sensible mais radicale. Ouverte au monde.

« La vie intime mène une vague existence d’ombre tant qu’elle n’est pas transformée ( arrachée au privé, désindividualisée ) en objets dignes de paraître en public.(…) C’est la présence des autres voyant ce que nous voyons, entendant ce que nous entendons, qui nous assure de la réalité du monde et de nous-même. » Hannah Arendt

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Autoportraits
é/moi(s)

L’eau. La terre. L’air. Le feu. C’est en méditant devant mes autoportraits que j’ai pris conscience que les photographies de mes « paysages » réalisées furtivement lors de mes balades, errances et autres promenades, et qui sont tous présents comme intériorités des visages, comme un en-dedans de la peau, parlent aussi de ça. De la nécessité du lien de l’homme à l’univers, au cosmos. En multipliant mes moi(s), je mets à jour les émois comme troubles nécessaires.
Car quoi de plus familier que soi-même ? Quoi de plus étrange (étranger) que soi-même ?
C’est par cette série d’autoportraits « é/moi (s)» que je propose d’interroger le monde qui nous entoure. Et notre place dans ce monde. Comment « mettre en offensive cette retraite » que peut représenter le portrait et bousculer ainsi ce qui d’ordinaire ne dérange pas mais rassure ? ( « Il est universellement admis que l’on a plaisir à retrouver ce que l’on connait. En un mot à reconnaitre. »
Freud )
Pour mettre en place cette déstabilisation physique et mentale du spectateur, une scénographie minimale et minutieuse est élaborée. Pour que tout vacille, à fleur de peau, à fleur d’esprit.
Le résultat est une boîte (à la fois cranienne et cosmique ?) très sombre. Presque opaque. Qui semble ne rien donner à voir. Rien de spectaculaire dans cette vision globale. Ce sont dans les points de rencontre entre la vision rapprochée, intime du spectateur et de l’oeuvre que se fait le spectacle. Car à travers le portrait qui s’efface et se révèle, au delà des frontières que dessinent les contours du visage, se cachent et se découvrent en strates d’autres vérités que celles de la peau.
C’est en invitant à la rêverie des profondeurs que cette proposition prend tout son sens car comme l’écrit Bachelard « la rêverie matérielle damasquine ses objets. Elle grave. Toujours c’est elle qui grave. Elle descend en continuant les rêves des travailleurs jusqu’au fond des substances. La figure sans cesse disparaît et nous échappe. »
C’est dans cette nouvelle perception sensorielle qui creuse les frontières du corps et de l’esprit, celles du monde sensible et intelligible, que l’inquiétante étrangeté amène à se perdre pour mieux se re-trouver.