Éric Enfrun

Création unique “Psyché N20”

1400,00

1 en stock

Création unique 70 x 90 cm

Huile et acrylique sur toile

2012

Psychés…

Extrêmoformes Eric Bénier-Bürckel, Ecrivain

L’œil est toujours avide du référent, de la chose représentée, voilà pourquoi il ne peut s’empêcher de rabattre ce qu’il ne connaît pas sur ce qu’il connaît, ou tout au moins d’essayer de reconnaître dans la forme inédite de ce qu’il voit pour la première fois les formes déjà là qui relèvent de la sphère de ses objets familiers, qu’ils soient mentaux ou culturels, comme si, au fond, il existait des invariants, ou plutôt des entités dont la forme (ou le sens), servant en quelque sorte de modèle immuable à tout ce qui existe, aurait été fixée de toute éternité. Tel n’est sans doute pas le cas. Et le drame, c’est que, pour cette raison même, trop souvent voir empêche de voir.
Voir au-delà de la vue servile dans laquelle l’œil aime à se complaire, c’est donc considérer la forme pour elle-même, indépendamment de tout référent. Il faut partir du principe qu’une forme est, mais ne représente rien. Par contre, il est évident qu’elle exprime des forces, des énergies, des tensions, des “lois” physiques, chimiques, quantiques : en elle s’entrecroisent, s’entrechoquent, s’amalgament, se resserrent, s’épousent tant bien que mal les remous, les temps et les espaces hétérogènes qui circulent dans le cosmos. Le “sens” découle de ces chocs et de ces collisions, il ne leur préexiste pas.
D’où tout cela vient-il ? Peu importe l’origine. L’origine, c’est maintenant. Que se passe-t-il maintenant ? De quels passages, de quels flux, de quelles tensions antagonistes la forme est-elle l’empreinte ?
Des Psychés, je dirai pour le moment qu’ils sont des “extrêmoformes”, des zones de rencontres entre extrêmes. Ces peintures tremblent encore de l’explosion ou de l’impact qui résulte de ces rencontres. Elles sont l’empreinte fascinante d’un cataclysme ou d’une catastrophe dont l’onde de choc vient sinon crever, du moins faire trembler les certitudes de l’œil.
S’il existe des extrêmophiles ( des organismes qui aiment les milieux a priori hostiles à la vie (mais qui sait ce qu’est réellement la vie ?)), je dirai que l’œil, lui aussi, déshabitué de voir ce qu’il connaît bien, peut le devenir à son tour, extrêmophile (l’amant des rencontres improbables entre forces extrêmes).